Diary Un chef - Une rencontre

Un Chef, Une Rencontre N°1 : Olympe Ricco

Salut Salut !!

Aujourd’hui, j’inaugure une nouvelle catégorie : Un Chef, Une Rencontre.

Cette première rencontre, et j’en suis très fière, s’est déroulée avec Olympe Ricco, Chef du Restaurant « Napoléon & Joséphine ».

Le restaurant « Napoléon & Joséphine » est situé à Los Angeles sur la célèbre Melrose Avenue. C’est le Premier Restaurant Corse de la Cité des Anges. Une tête de Maure orne le fronton du restaurant tel un phare signalant une terre Corse en plein territoire américain. La promesse est grande mais nos attentes vont vite être comblées.

Lorsque nous entrons dans ce charmant restaurant, nous avons droit à un accueil très chaleureux et en trois langues s’il vous plait (Anglais, Français, Corse).

La décoration est soignée, la vaisselle est originale, dépareillée à souhait et surtout très belle. Napoléon est bien entendu présent sur les murs.

Au niveau musical, la musique Corse côtoie les classiques de la chanson Française.

Un sentiment de déjà vu nous envahit, à plus de 10 000 kms de notre île, on se croirait à la maison!

Voici quelques images du restaurant et des délicieux plats que nous avons mangé lors de nos deux visites chez « Napoléon & Joséphine » !!

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J’ai eu également l’énorme chance de pouvoir interviewer Olympe Ricco durant quelques minutes. Une interview d’une chef passionnée et riche en informations!! Bonne lecture à vous !

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Interview

Poluccia : Bonsoir Olympe. Merci de nous accorder un peu de ton temps pour répondre à quelques questions. Première question : la cuisine, c’est une passion depuis toute petite ?

Olympe Ricco : Oui exactement,  je suis tombée dans la « cocotte » toute petite.

Poluccia : Peux-tu en quelques mots, nous raconter ton parcours ?

Olympe Ricco : Mon parcours est très simple, j’ai commencé tout d’abord avec mes parents, qui sont restaurateurs. j’ai également beaucoup appris avec ma grand-mère. Je n’ai pas fait le cursus scolaire classique, le cap, le bep, parce que cela ne m’intéressait pas, j’ai tout de même essayé pendant quelques jours.

Par la suite, je me suis déplacée, et j’ai eu la chance de pouvoir accéder à toutes les cuisines dans lesquelles je voulais rentrer.

Poluccia : Quel est ton plat préféré ? Plutôt sucré ou salé ? Ou alors as-tu une cuisine que tu aimes plus qu’une autre ?

Olympe Ricco : C’est une question que l’on me pose souvent et à laquelle je ne peux pas répondre. Je n’ai pas un plat préféré. J’aime beaucoup la cuisine hivernale, les mijotés. La cuisine d’hiver me parle plus que la cuisine d’été.

Poluccia : Comment tu pourrais qualifier ta cuisine ? Traditionnelle, moderne ?

Olympe Ricco : Ma cuisine, elle est plutôt traditionnelle, je ne suis pas trop dans le moderne. Je suis quelqu’un qui n’aime pas trop changer les recettes.  Je revisite très peu de plats. J’aime garder pour les plats authentiques, leur vraie recette, et notamment les recettes que l’on m’a apprises comme celles de ma mère ou de ma grand-mère.
Après, au niveau de la carte du restaurant, on la change souvent, il faut avoir des idées, il faut renouveler et innover.  Au niveau du travail de recherches, il se fait sur le moment quand nous sommes en cuisine. Je puise mes inspirations à la minute, Je ne suis pas quelqu’un qui peut préparer un plat à l’avance. Je le visualise et je le vois quand j’ai tous les ingrédients autour de moi.

Poluccia : Donc c’est pour cela, que tu utilises des produits frais ?

Olympe Ricco : Oui. J’utilise toujours des produits frais, et surtout des produits sélectionnés, c’est très important.

Poluccia : Est-ce que tu aurais une recette fétiche ? Une recette qui te suit depuis toutes ces années ?

Olympe Ricco : Encore une fois, ce sont nos recettes corses car elles font parties de notre culture, donc évidemment que ce soit « l’agneau a l’istretta », « le sauté de veau », « le sanglier », « le marcassin grillé », toutes nos recettes traditionnelles, cela reste ma cuisine de base, c’est ce que j’ai appris en premier.

La vie à Los Angeles

Poluccia : Cela fait trois ans, si je ne me trompe, que tu es installée dans la Cité des Anges. Pourquoi ce choix ? Pourquoi Los Angeles ?

Olympe Ricco : Alors, ce choix, C’est très simple, on a vite fait le tour chez nous. Je suis allée au bout de tout ce que je voulais faire en Corse. J’ai eu mon restaurant pendant quelques années, qui a très bien marché, et pour moi c’était un des meilleurs restaurants de la Balagne.
On a décidé de changer de vie, cela c’est fait du jour au lendemain. Les grandes décisions dans la vie se font très vite, il faut amorcer l’idée et se dire que l’on veut le faire. Soit on le fait, soit on le fait pas, car si on ne le fait pas maintenant, on le fera jamais. Il faut bien sûr s’organiser pour pouvoir le faire. En une nuit: c’était décidé !

Poluccia : Justement, ce n’était pas un pari risqué d’ouvrir le premier restaurant corse à Los Angeles ?

Olympe Ricco : Évidemment !! Ce n’était pas risqué, c’était PLUS que risqué. C’est-à-dire que j’ai eu des dizaines de personnes qui m’ont déconseillée, que ce soit des avocats ou des personnes travaillant dans la restauration à Los Angeles.
Le peu de Corses qui habitent à Los Angeles sont dans la restauration, mais dans la restauration américaine. Il y a beaucoup plus de potentiel à vendre des « burgers » ou du « vegan » que du « sauté de veau aux olives ».

Poluccia : Comment arrives-tu à te démarquer au niveau de ta cuisine ? Plus d’influences corses ? Cuisine française ?

Olympe Ricco : On ne peut pas faire qu’une vraie cuisine traditionnelle corse. On ne peut pas être qu’un restaurant corse. On est obligé de varier, déjà ne serait-ce que par le fonctionnement de la carte. Nous avons une carte ardoise qui change tout le temps. Je ne peux pas avoir tous les produits corses qui me permettent d’avoir assez de choix. On mixe et notamment avec nos influences qu’elles soient françaises ou italiennes. On tourne autour de la Méditerranée.

Poluccia : Ta cuisine ne « s’américanise » pas encore? Risque-t-elle de « s’américaniser » un jour ?

Olympe Ricco : Non, certainement pas. On se donne pas tant de mal à choisir et sélectionner des produits, car ce n’est quand même pas facile de trouver de bons produits. Cela a mis du temps, c’est comme une enquête. Une fois que l’on a trouvé les produits idéals, on n’a pas envie de les « américaniser ». Il y a de nombreux restaurants pour manger « américain ».
Comme je te disais au début, on nous a beaucoup déconseillé car il faut savoir que Los Angeles, c’est une des villes dans le monde où c’est le plus difficile d’ouvrir un restaurant. La ville est tellement vaste, il n’y a pas de concentration de population. Il n’y a pas de hauts immeubles. Les personnes testent beaucoup de choses différentes.
De plus au niveau du fonctionnement de la ville. Le fait que l’on se déplace en voiture, les gens vont d’un point A à un Point B. Il n’y a pas de gens qui vont marcher dans la rue, ils ne vont pas lire la carte de ton restaurant ou ton menu et s’arrêter pour manger. C’est 1% de la clientèle. Il faut que les gens viennent à toi et viennent spécialement manger chez toi. J’ai quand même voulu tenter l’expérience, c’était un Challenge.

Poluccia : Peux-tu nous faire un petit bilan de cette expérience ?

Olympe Ricco : Cela fait un an cette année que le restaurant est ouvert, un bilan très difficile les premiers mois car il faut du temps pour se faire connaître.

Tout fonctionne avec les réseaux sociaux, que ce soit Instagram, Facebook, Yelp. Il faut avoir quelqu’un à plein temps qui ne s’occupe que de ça. Ici, les personnes qui réservent par téléphone, sont très rares. Toutes les réservations se font par Internet, les valets de Parking sont payés d’avance. C’est un nouveau fonctionnement.

Même si on est situé sur Melrose Avenue et que c’est une des rares rues où il y a des personnes qui marchent;il n’y a pas de personnes qui s’arrêtent par hasard.

Donc, il faut plusieurs mois avant de faire ta clientèle. Les américains sont très critiques, ceux qui viennent dans ce genre de restaurant, ce sont des personnes qui ont voyagé; ce sont des connaisseurs et qui sont en attente d’une cuisine. Si les personnes viennent dans un restaurant français, c’est qu’elles ont un palais « aiguisé ».

Mais au bout d’un an, pour revenir au bilan, nous sommes très contents. Cela a pris un peu de temps, mais nous avons un noyau de clientèle fidèle. On arrive au bout (rires)

Poluccia : Est-ce qu’il y a beaucoup de Corses qui viennent te rendre visite ?

Olympe Ricco : Tous ceux qui sont en vacances à Los Angeles viennent ! Comme vous !

Poluccia : La preuve. Avec Antò, c’est la première chose que l’on a fait en préparant ce voyage, c’est de chercher s’il y avait un restaurant Corse à Los Angeles.

Olympe Ricco : (rires) C’est marrant.

Poluccia : Comme on dit chez nous, on ne reste pas éloignés de ses racines. Nous voulions retrouver cette petite ambiance corse que l’on a évidemment retrouvée avec ces plats délicieux. D’ailleurs, pourquoi avoir choisi Napoléon et Joséphine comme nom du restaurant ?

Olympe Ricco : Je ne sais pas comment l’expliquer, je ne saurais pas te dire. Le nom m’est venu comme ça. Je me suis toujours dit : «ça sera Napoléon & Joséphine». Même avant que j’achète ce lieu. J’ai dit à mes clients quand je fermais mon restaurant, je pars aux Etats-Unis, mais n’oubliez pas, mon restaurant s’appellera «Napoléon & Joséphine ».
Ce nom me parlait, et puis Napoléon est connu dans le monde entier. Les gens vont te dire «La Corse : je ne connais pas», alors que «Napoléon : Yes, sure!»

Poluccia : Avant d’oser venir te rencontrer (et je suis très émue de faire cet interview), je me suis un peu renseignée sur toi, j’ai lu que tu allais apprendre la fabrication du brocciu à une bergère américaine qui fabrique déjà du fromage « bio », Peux-tu nous parler de cette rencontre ?

Olympe Ricco :  C’est mon ami, Jean-Louis B. qui habite ici depuis 30 ans, et qui travaille dans le bio. Grâce à lui, j’ai fait pu faire la rencontre d’une bergère. De plus, il faut savoir que dans toute la Californie et jusqu’à San Francisco il y a seulement 2 troupeaux de chèvres.

Cette bergère se trouve à la frontière du désert, elle a 500 chèvres qui sont traites à la main. Nous avons discuté, je lui ai expliqué la fabrication du Brocciu, et elle me répond que dans la fabrication de son fromage, le petit lait, elle le jette.

J’ai eu un planning chargé cet été, mais comme on rentre dans l’hiver, on a prévu de se rencontrer de nouveau pour tester, j’ai ramené des fattoghje qui ont été faites à Corte et on va tenter l’expérience.

C’est vraiment important pour moi. Le brocciu, c’est une des bases de la cuisine Corse, de beaucoup de plats. C’est quelque chose qui est unique au monde dans sa fabrication. Il y a aucun autre pays où l’on fabrique le fromage de cette façon. Que ce soit la brousse, la ricotta, il n’y a rien qui vaut le Brocciu !

Là nous sommes obligés de composer, par exemple les cannelloni sont faits avec la ricotta, mais j’espère plus pour longtemps.

Poluccia : Est-ce que tu as déjà essayé d’importer du Brocciu ?

Olympe Ricco : Madame S. , qui est bergère sur la route de Galeria, fait un brocciu «salinu», c’est un brocciu que l’on faisait avant pour pouvoir le conserver. Le brocciu était salé à saturation. On peut très bien faire un dessert avec un brocciu « salinu ». Pour le Fiadone, il va falloir le dessaler au maximum trois ou quatre jours jusqu’à ce qu’il y ait plus de sel.

Donc ça, c’est une façon de conserver le brocciu. Après pour l’envoyer, ça pose un peu plus de problèmes surtout avec la réception des colis.

Mais, nous avons cette solution de fabriquer le brocciu, donc on va la tester, et on verra bien par la suite.

Poluccia : Pour finir, est-ce que tu pourrais donner un petit conseil, à mes fidèles lecteurs et à tous les amoureux de la cuisine qui voudraient se lancer dans ce métier?

Olympe Ricco : Se lancer dans ce métier ? C’est-à-dire ? Ouvrir un restaurant ?

Tout d’abord, s’il n’y a pas de passion pour la cuisine, on ne peut pas exercer ce métier. C’est un métier très dur.

Pourquoi il n’y a pas énormément de femmes en cuisine ? Parce qu’il n’y a pas de vie de famille. C’est un métier très prenant, tout le temps, ça ne s’arrête jamais. Même le soir quand tu fermes la porte de «ta cuisine», et que tu rentres chez toi, il faut penser au menu du lendemain, aux fournisseurs. C’est très particulier de se lancer dans la restauration surtout quand on ne connaît pas.

Être restaurateur c’est un vrai métier. Un restaurateur doit être chef de cuisine, il doit être capable de pouvoir prendre la place du Chef. C’est un métier difficile, et quand on est passionné, on veut que les choses soient bien faites, que les plats sortent comme tu veux toi, et pour cela, tu ne peux pas déléguer vraiment et complètement. Il faut être là tout le temps. Autrement, ça ne marche pas.

Donc, si je dois conseiller, je dirais « Non, c’est très dur et difficile ». Après, il y a des tas de métiers qui sont liés à la cuisine et qui ne sont pas des métiers de Restauration.

Poluccia : Merci beaucoup Olympe pour cet échange très intéressant et enrichissant.

Olympe Ricco : Merci à toi, c’était un plaisir.

 

Pour plus d’informations:

Concernant la réservation pour venir manger dans ce restaurant. Nous avons réservé notre table sur OpenTable, qui est un site de réservations en ligne.

Napoléon & Joséphine

7212 Melrose Avenue
Los Angeles, CA 90046

Tel: 323 424 7487

Site : www.napoleonandjosephine.net

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